Processus individuel

 

 

Un tsigane disait : « Les camps, c’est de l’encre et du papier ».

Cette composition se présente sous la forme de trois tiroirs identiques dans une évocation très minimaliste d’un meuble d’un bureau de Préfecture.

Ce qu’il faut aller chercher, le plus important, est à l’intérieur des tiroirs.


Premier tiroir : Arrestation

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La structure graphique principale (les bandes de papier) est horizontale. Elle évoque l’universalité, la transversalité et la dimension génocidaire du processus intellectuel. En effet la bureaucratie et la technocratie, puisqu’il en est ici question, sont les moyens organisationnels pour parvenir à l’élimination systématique.

Lorsque la puissante machine étatique met en œuvre ses services dans un but d’élimination systématique d’une communauté cela entraîne un génocide. Le barbelé forme des cases, évoquant un classement par catégorie. Le personnage au deuxième plan est dans plusieurs catégories. Lorsqu’on veut éliminer un individu, plusieurs moyens,  tous plus efficaces les uns des autres, mènent au résultat voulu politiquement. Dans ce premier tiroir, est évoquée la constitution de fichiers menant à une classification fatale et mortifère.

 


Deuxième tiroir : Concentration

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Le fond (les bandes de papier) est maintenant vertical. Il évoque l’interrogation qu’imposent le système concentrationnaire et son processus d’élimination à l’âme humaine et aux croyances de tous types. La liaison entre le ciel, la spiritualité, et la terre, la matérialité, est ici rompue ou du moins en interrogation permanente. Le même personnage issu des tris sélectifs est dans la même position. Il paraît dans le même espace temps et pourtant il n’en est rien. Sa condition est changée parce que son rapport aux autres a changé. Pourquoi le Dieu, en lequel ils croient, les a abandonné ? On remarque aussi que le nombre de fils barbelés diminue.

 


Troisième tiroir : Désindividualisation

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« Ils ont tué la mort ». S’il n’y a pas de vie humaine identifiable avec nos repères, nous ne pouvons imaginer comment les déportés pouvaient envisager leur mort. Quelle représentation pouvaient-ils s’en faire ? Avec ce dernier tiroir, tous les repères identifiables éclatent. Les fils barbelés sont entassés sans structure. Le personnage que l’on pouvait identifier quelque temps avant n’est plus qu’une déstructuration mentale désincarnée.

La déréliction, l’innommable, le non mesurable …